Agroécologie et technologie

Une plateforme digitale pour renforcer les communautés paysannes

Le changement climatique impacte fortement le travail des paysan-ne-s de Colombie. Si l’agroécologie est une solution efficace pour améliorer leur résilience, elle demande du temps et des connaissances. En partageant leurs expériences et conseils sur une plateforme digitale, les communautés paysannes renforcent leurs capacités. En particulier, les femmes qui apprennent à avoir confiance en leur rôle central au sein des communautés.

En bref

Pays, région:
Colombie
Durée:
Janvier 2023 - décembre 2024
Bénéficiaires:
300 bénéficiaires directs, 1200 indirects
Budget total du projet:
102'036 CHF

But

Face à l’aggravation des conditions climatiques et aux nouveaux défis qui en découlent, les paysan-ne-s et éleveur-se-s ont besoin de soutien pour expérimenter et développer leurs propres solutions. L’environnement variant selon les régions, seules des pratiques agroécologiques adaptées aux écosystèmes respectifs renforcent la résilience des systèmes alimentaires locaux et la capacité d’adaptation des exploitations agricoles familiales. La création d’espaces de micro-laboratoires agroécologiques – appelés Laboratoires agroécologiques pour l’adaptation au changement climatique (AeD-LAB) – permettant d’expérimenter, d’échanger et de renforcer ses propres connaissances.

Ses longs cheveux noirs tombent en cascade de chaque côté de son visage. Autour d’un grand bassin d’eau de pluie ou au milieu de potagers verdoyants, Luz Marina Ladino présente, explique et répond aux diverses questions. Le tout avec aisance, la tête haute et les yeux rieurs.  Bien loin du portrait de la femme qu’elle était il n’y a de cela que deux ans: «J’étais très timide, je n’osais pas parler aux gens. J’avais l’impression qu’un micro allait me dévorer!», dit-elle moitié ironique, moitié sérieuse. «Je me cachais toujours derrière les gens, là où ils ne pouvaient pas me voir.»

Cette paysanne colombienne de 47 ans a parcouru bien du chemin depuis. Et ce n’est pas la seule. Dans ces hauts plateaux andins, un vent de changement a soufflé sur la vie des paysannes et paysans de sa communauté. Un changement appelé agroécologie.

A l’aise au milieu de nombreuses personnes, Luz Marina Ladino a bien changé en quelques années. Ici, elle présente son exploitation qui grâce à l’agroécologie a amélioré son rendement. Elle partage également les connaissances qu’elle a acquises grâce aux échanges avec d’autres paysan-ne-s.

Repères bouleversés

La Colombie est un pays particulièrement vulnérable au changement climatique. La majorité de la population habite en altitude ou dans les régions côtières, dont le climat oscille entre épisodes de sécheresse et pluies diluviennes. Une instabilité qui rend la planification des cultures particulièrement difficile pour les familles paysannes. Les récoltes sont de plus en plus maigres et la faim s’en ressent.

Pourtant, avec des connaissances adaptées aux conditions locales, les familles paysannes peuvent faire face aux aléas climatiques et lutter contre la faim. C’est dans ce but que SWISSAID a élaboré un projet pilote appelé AeD-Labs. Acronyme de Agroecological Adaptation Labs, ce projet encourage les paysan-ne-s à expérimenter des solutions simples et efficaces pour renforcer leurs écosystèmes face au changement climatique. Les paysan-ne-s expérimentent dans leurs champs des techniques agroécologiques comme des haies naturelles à base de plantes fourragères, la fertilisation des sols de manière ciblée, ou encore du fourrage fait maison pour leurs animaux.

Votre don compte

Le paysan en Équateur. La mère de famille au Niger. Le garçon au Myanmar. La femme en Colombie. La famille en Tanzanie. L'homme au Tchad. La jeune fille en Inde. Le père en Guinée-Bissau. La paysanne au Nicaragua. Ils bénéficieront tous de votre don.

La force du partage

L’agroécologie est la meilleure réponse au changement climatique, mais elle demande du temps. Loin d’être une solution toute trouvée, elle passe par des essais-erreurs, des améliorations, des adaptations. Pour faciliter l’adoption efficace de bonnes pratiques, une application digitale a été créée en collaboration avec la start-up sociale Farmbetter et les paysannes et paysans.

Cette plateforme permet aux communautés confrontées aux mêmes défis d’échanger leur savoir et leurs innovations en matière d’agroécologie. Ainsi, certaines innovations peuvent être utilisées au sein du même village, mais aussi dans des environnements identiques, comme par exemple les Andes équatoriennes et les páramos de Colombie. Grâce à l’application digitale, les frontières tombent et les connaissances sont utiles au plus grand nombre. C’est aussi une plateforme qui permet de mettre en avant les avancées agricoles, sensibiliser les jeunes et attirer l’attention sur l’immense travail fourni par les paysan-ne-s.

L’agroécologie a changé la vie de Luz Marina Ladino. Après avoir testé et adapté des techniques agroécologiques sur ses terres, elle a pu partager ses expériences sur la plateforme Aed-Labs.

Une voix retrouvée

Les femmes sont le pilier des communautés. Responsables des enfants, de l’éducation et de l’alimentation, ce sont souvent elles qui restent dans les villages pour s’occuper de la famille. Elles jouent donc un rôle majeur dans la lutte contre la faim, mais avec peu de moyens. Elevées dans une société patriarcale limitante, elles n’ont jamais appris à se positionner, parler en public ou avoir confiance en elles. Le projet s’est donc attelé à renforcer la confiance des femmes et les encourager à participer aux institutions et initiatives locales. «En deux ans, nous avons participé à de nombreux ateliers de femmes. On se rencontre, on se libère de nos peurs, on s’ouvre aux autres. Nous nous sommes réveillées et émancipées. Nous sommes désormais conscientes de nos capacités, nous savons compter sur nos propres ressources, nous ne sommes plus silencieuses», explique Luz Marina. Et cela a un impact positif sur toute la communauté.

À travers une approche participative et inclusive, AeD-Labs célèbre la richesse des connaissances locales tout en introduisant des innovations pratiques qui renforcent les écosystèmes ainsi que la confiance des paysan-ne-s. «J’ose maintenant parler en public», confie Luz Marina, symbolisant la voix retrouvée de ces paysannes et paysans qui, autrefois silencieux, sont désormais actrices et acteurs de changement dans leur communauté et au-delà.